Le dispositif encore en vigueur pour quelques mois ne traite pas des catégories de salariés au travers d’un texte commun : pour les ingénieurs et cadres de la métallurgie, une convention collective de portée nationale est en application depuis 1973.
Positions et coefficients
Les salariés sont classés en fonction d’une position (I, II ou III) et d’un coefficient qui évolue en fonction de l’âge (en tout début de carrière) puis du nombre d’années d’expérience du salarié.
La position I est réservée aux jeunes salariés, qui terminent tout juste leur scolarité ou ne justifient pas encore un minimum de 3 ans d’expérience. Typiquement, un nouvel embauché qui sort des études à BAC+5, à 23 ans, rentre chez Lectra au coefficient 76. Au 3ème anniversaire de sa date d’entrée dans l’entreprise, il atteint automatiquement le coefficient 100 et passe en position II (PII).
Une fois catégorisé en PII, le salarié continue de progresser automatiquement : tous les 3 ans, il change de coefficient jusqu’à atteindre 135, au terme de 21 ans de carrière dans l’entreprise.
Au-delà, la progression automatique n’existe plus. Il y a bien une position 3 avec des coefficients supérieurs, mais chez Lectra en tous cas, cette catégorie est réservée à des postes élevés d’un point de vue hiérarchique.
La grille des rémunérations minimales
A cette catégorisation des salariés cadres PI et PII, il faut maintenant juxtaposer la grille des minima définie par la convention.
La grille ci-dessus présente l’ensemble des coefficients, avec en face les salaires minimum annuels (bruts) pour les cadres 35h et les cadres 218 jours. Il y a une différence de 30% à la faveur des 218 jours. Ainsi, un cadre 35h coefficient 100 devra avoir une rémunération au minimum égale à 30179€, et un cadre 218 jour à 39233€.
Précisons également que des négociations nationales ont lieu chaque année afin de revaloriser la grille, principalement pour neutraliser l’effet de l’inflation (les valeurs ci-dessus sont extraites de la grille 2023).
La règle fondamentale de cette grille est la proportionnalité entre la valeur du coefficient et le minimum de rémunération associé. En d’autres termes, cela signifie que le coefficient représente un pourcentage du salaire de base : le minimum du coefficient 135 vaut 135% de celui du coefficient 100, soit une différence de 35%.
Très concrètement, ce mécanisme assure à un salarié qui commence sa carrière chez Lectra au coefficient 100, avec un salaire équivalent au minimum de la grille, une progression salariale d’au moins 35% (hors inflation) au cours des 18 premières années !
Quelle situation à Lectra ?
Afin de connaître les effets de la convention de 1973 sur les rémunérations de la population des cadres de Lectra, il est nécessaire d’estimer comment nous nous situons par rapport aux minima. En effet, une entreprise dont les salariés sont rémunérés bien au-dessus des minima, n’a pas la même adhérence à la convention qu’une entreprise dans laquelle les salaires réels sont proches de ceux de la grille.
Les données numériques présentées ci-dessous sont issues d’une étude d’impact réalisée par nos soins fin 2021, à destination des négociateurs Cfdt de la nouvelle convention.
Deux chiffres pour commencer :
- l’effectif de Lectra est composé d’ingénieurs et cadres à 77%
- pour les seuls forfais 218 jours PI et PII, nous sommes à 66% de l’effectif global, soit les 2/3 des salariés de l’entreprise.
Voici comment nous avons pu catégoriser les rémunérations pour cette population.
Comment lire ce graphique ?
- 35% des salariés PI ou PII 218 jours ont leur rémunération proche du minimum conventionnel (écart inférieur à 2%).
- 14% sont dans une tranche un peu plus élevée par rapport aux minima, mais sont en dessous du minimum du coefficient supérieur.
- En tout, ce sont donc 51% dont la rémunération est en dessous du minimum du coefficient supérieur. Pour cette population, un changement de coefficient dans les 3 ans aurait un effet direct sur la rémunération.
Pour résumer, pour la moitié des cadres 218 jours de Lectra, la progression de la rémunération est étroitement liée à l’évolution du coefficient. Ceci s’explique lorsque le salaire reste relativement proche des minima définis par la grille, donnant une courbe de progressions “en escalier”, dont les marches coïncident avec les changements de coefficient.
Pour cette population, l’évolution automatique de coefficient est prépondérante sur tout autre mécanisme de revalorisation salariale (augmentations générales issues des NAO, augmentations individuelles).
Si ce phénomène peut engendrer un sentiment de frustration chez le salarié (“je suis payé au minimum légal“), il faut également avoir conscience du fait que la convention actuelle assure une progression conséquente (+35% hors inflation en 18 ans) durant la première partie de carrière, au moins pour ceux qui rentrent tôt dans l’entreprise.
Dans notre prochain article, nous ferons le même exercice concernant le dispositif conventionnel actuellement en place pour les non cadres.