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NAO 2022 : un accord tourné vers l’avenir ?

Le mercredi 9 février dernier, Lectra a rendu publics les résultats de l’année 2021. Une année exceptionnelle à plus d’un titre : trois acquisitions de sociétés dont l’américain Gerber, notre ancien concurrent historique et un retour des commandes et du chiffre d’affaires bien au-delà des objectifs, qui avaient été fixés au terme d’une année 2020 marquée par la crise sanitaire. Paradoxalement, Lectra a subi une vague de démissions inédite par son ampleur, soulevant des interrogations quant à l’attractivité de la société au sein d’un marché de l’emploi fortement concurrentiel et en pleine mutation : télétravail, équilibre entre vie privée et vie professionnelle, qualité de vie au travail, sont des thématiques devenues aujourd’hui incontournables.

C’est dans ce contexte que s’est tenue la Négociation Annuelle Obligatoire (NAO), qui s’est conclue début février sur un accord entre la Direction et les organisations syndicales. 

Quel contenu dans ce nouvel accord, en termes de rémunération ?

1. Augmentation générale : 2.8%, avec un plancher de 840€ bruts/an

L’augmentation générale de 2.8% permet de compenser les effets de l’inflation sur le pouvoir d’achat de l’essentiel des salariés, ceux dont la rémunération annuelle est inférieure à 65k€ annuels. Cette compensation de l’inflation est d’autant plus nécessaire que l’inflation est forte. Un plancher de 840€ accorde un petit coup de pouce aux salariés les moins rémunérés (3.5% pour le salaire minimum à Lectra). Ce plancher, maintenant accordé huit fois sur les neuf dernières années, permet lentement mais sûrement d’augmenter le pouvoir d’achat des plus petits salaires de l’entreprise.

Nous n’avons malheureusement pas réussi à obtenir une revalorisation du point d’ancienneté pour les non cadres, mesure que nous jugeons également vertueuse pour les moins bien rémunérés. Le point stagne donc cela représente une érosion du pouvoir d’achat dans un contexte inflationniste.

2. Augmentations individuelles : 2% de la masse salariale

La vraie nouveauté se situe dans cette composante de l’accord. C’est la première fois que l’enveloppe liée aux augmentations individuelles apparaît noir sur blanc dans un accord NAO. Surtout, cela correspond à un doublement de l’enveloppe habituelle.

En effet, traditionnellement, le montant de l’enveloppe consacrée par Lectra aux augmentations salariales se situait autour de l’inflation + 1%, le montant de l’inflation souvent consacré aux augmentations générales, et 1% consacré aux augmentations individuelles. Cette année, 2% de la masse salariale seront consacrés aux augmentations individuelles. C’est loin d’être négligeable, mais les besoins ne le sont pas moins.

Ces 2% doivent répondre à un double objectif : d’une part retrouver pour certains emplois des niveaux de salaire compétitifs au regard du marché du travail, d’autre part accorder des augmentations individuelles dites « au mérite ». Pour les cadres au forfait jour, 2% permettent aussi de rivaliser avec les minima conventionnels de la métallurgie (un précédent article sur le sujet) qui évoluent en moyenne comme l’inflation  + 1.8%.

Nous estimons que 2% cette année permettront de répondre partiellement aux enjeux identifiés. L’un de nos regrets est de ne pas avoir su partager avec la direction le besoin de fixer la composante « rattrapage » et celle liée aux augmentations au mérite. Les moyens étant limités, la première composante prendra peut-être l’ascendant sur la seconde.

Des places en crèches pour les salariés

Un sujet qui fait son retour, invité à la table des négociations par la Direction, afin de répondre à une difficulté croissante des salariés d’accéder à des places en crèche pour leurs très jeunes enfants. L’objectif, assumé, est d’ajouter un moyen d’attractivité pour de nouveaux embauchés, ou de fidélisation pour les salariés jeunes parents.

Le principe : Lectra réserve un certain nombre de « berceaux » dans un réseau de crèches privées, réparties sur tout le territoire français (Paris inclus). Un système de priorisation (à la charge du prestataire) attribuera les places disponibles parmi l’ensemble des candidats. Pour cette première année, 25 places seront réservées. Sachant que la population de Lectra connaît environ une trentaine de naissances par an, soit approximativement 90 enfants entre 0 et 3 ans, sachant également que ce mode de garde n’en est qu’un parmi d’autres, la jauge nous semble correctement calibrée pour tester ce nouveau dispositif. La Direction compte ajuster cette jauge au fil des années, en fonction du succès rencontré. Le dispositif entrera en fonction en septembre prochain, avec l’ambition de le pérenniser dans un prochain accord.

Ne vous méprenez pas : il ne s’agit pas d’un financement de la garde par Lectra, mais seulement d’une réservation de place.

Un accord précurseur ?

Si nos demandes n’ont pas toutes été retenues, nous avons jugé que cet accord était bon pour les salariés et devait être signé. Vous l’aurez compris, il est pour nous le signe de la prise en considération des attentes des salariés, actuels comme futurs, sur un marché de l’emploi plus tendu que jamais. La capacité à conserver et à attirer ses talents est l’une des clés dans la réussite de l’entreprise, qui a pris cette année une nouvelle envergure.

Daniel Harari est clair dans son intention de maintenir ce cap pour les années à venir en termes de politique salariale. Notre principal regret est de n’avoir pas réussi à traduire cette intention dans la rédaction de l’accord, non pas à cause d’un déficit de confiance, mais tout simplement afin de donner une meilleure visibilité aux salariés, et de pouvoir prendre à notre compte cet objectif de long terme.

L’orientation prise aujourd’hui est d’autant plus cruciale qu’une nouvelle convention de la métallurgie vient d’être adoptée, et qu’elle fait en particulier disparaître l’évolution automatique du coefficient. Nous traiterons ce point plus en détail dans une prochaine publication, mais connaissant le poids de ce mécanisme dans l’évolution des rémunérations chez Lectra, il va être fondamental de repenser en profondeur, dans les 2 années à venir (échéance de l’application de la nouvelle convention), la politique salariale de l’entreprise.

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